Les enseignants, ouain pis?

Publié le par Gabrielle Boivin

Généralement, ce blogue n’est pas engagé, ni politisé.

Mais il y a un début à tout.

«En augmentant à 35 heures la semaine de travail d'un enseignant sans changer le salaire annuel, le gouvernement décrète une baisse de la rémunération, ont dénoncé les syndicats.»

«Le nombre maximum d'élèves par classe varie à l'heure actuelle: de la 3e à à la 6e année: 26 (20 dans les milieux défavorisés); à la 1re secondaire: 28; à la 2e secondaire: 29; et de la 3e à la 5e secondaire: 32.»

«Québec propose d'éliminer la notion de «ratio moyen» d'élèves par classe. Le maximum prévu dans les règles deviendrait donc la norme. Et ce maximum serait revu à la hausse, mais le gouvernement n'a rien chiffré jusqu'ici. Il veut également ajouter des clauses que pourraient utiliser les commissions scolaires pour former des groupes qui dépassent le maximum permis.»

-La Presse, 17 décembre 2014.

Lettre à monsieur le ministre de l’éducation.

Je viens de terminer les nombreuses lectures à ce sujet. Je suis scandalisée. Choquée.

Je suis enseignante depuis peu, mais je pense avoir le droit de m’exprimer quand même, pour mon avenir dans la profession, pour mes collègues, et pour moi.

Je ne veux rien enlever à votre profession, Dr Bolduc, au contraire, je l’admire. Mais comment un médecin peut savoir ce qui est le mieux pour l’éducation? Pour nos élèves, pour vos enseignants? Clairement, avec de telles décisions, pas vous.

On le sait, le gouvernement actuel veut économiser. Le jour, la nuit, économiser tout le temps, et partout. Mais à quel prix? Vous ne vous rendez pas compte des conséquences dévastatrices que peuvent avoir ces changements. Il ne s’agit pas, pour nous, de quelques dollars d’épargne, mais bien de la vie de milliers de gens.

Tous ces enseignants qui sont à bout et qui soufflent à peine, que leur envoyez-vous comme message? Que c’est facile leur travail. Comme si on se plaignait le ventre plein. Nous sommes loin d’être gâtés si on pense au salaire que nous recevons versus le nombre d’heures qu’on fait par semaine. Environ 40% des nouveaux enseignants abandonnent le domaine après 5 ans seulement dans le métier. Parce que c’est trop difficile. Parce qu’on leur en demande trop. Qu’allez-vous faire?

Pourquoi l’éducation n’est pas une priorité dans la société? Pourquoi ne pas valoriser les enseignants en reconnaissant leur travail? En les encourageant?

Avez-vous déjà enseigné à une classe de 32 élèves? Avez-vous déjà essayé de les faire taire un vendredi dernière période? Avez-vous déjà essayé de faire allumer l’étincelle tant désirée dans leurs yeux avec des fractions ou des participes passés?

En augmentant le nombre d’élèves dans une classe, vous faites une grave erreur.

Ça représente des tonnes de jeunes qui passeront dans les mailles du filet de l’éducation parce que leur prof est trop débordé. Des jeunes qui n’auront jamais les réponses à leurs questions. Qui arriveront en secondaire 5, on ne sait pas comment, avec de grandes lacunes, autant académiques que culturelles que sociales. Parce qu’ils n’auront pas eu droit au temps privilégié que l’enseignant leur doit. Que l’enseignant veut donner à ses élèves. Vous diminuez la qualité de l’enseignement. C’est aussi simple que ça.

Êtes-vous conscient, monsieur, que chaque année, des centaines d’élèves graduent sans avoir lu un seul livre? N’est-ce pas scandaleux? Vous avez d’ailleurs affirmé, pour votre défense, «qu’ils ne mourraient pas s’ils n’avaient pas de livres neufs.» Non, en effet. Ils ne mourront pas. Mais est-ce le premier objectif du MELS? Que les élèves vivent? Ou plutôt, qu’ils survivent? Il ne faudrait surtout pas leur donner le goût de la lecture avec de nouveaux romans. Ces élèves n’auront pas un enseignement digne de ce nom simplement parce que vous avez décidé de couper dans leurs services.

Pourquoi couper dans l’éducation encore?

Avec quelles ressources voulez-vous qu’on forme les futurs médecins? Les futurs ministres? La future société? Avec quel temps? Quelle patience?

Je pense que le Québec a des devoirs à faire. Il faut se questionner sur nos priorités. Rapidement.

Il faut cesser de voir l’éducation comme une dépense et commencer à la voir comme un investissement. Comme une richesse.

Pour l’instant, votre gouvernement n’a rien proposé pour aider qui que ce soit dans le système d’éducation.

Ni les élèves, ni les enseignants, ni les directions, ni les parents..

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M
Encore une fois la génération au pouvoir prend des décisions qui auront un impact sur les générations future.<br /> Ils s'en foutent, ils ne sont là que pour quatre ans.<br /> Tout un système de démocratie.
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C
Voilà bien un article juste et rempli de vérités. Enseignante depuis plus de 3 décennies au primaire, accompagnatrice pour les nouveaux profs et superviseure à l'université pour notre belle relève, je fais beaucoup plus d'heures que celles qui seront prescrites et pourtant, je ne les compte jamais. Je demeure une passionnée et je suis fière lorsqu'un enfant accomplit ce qui lui semblait impossible. Je ne reçois que mon salaire au primaire, les autres tâches étant considérées comme des services. Je ne suis pas la seule à donner sans jamais compter, nous sommes en majorité. Nous avons un entourage qui comprend, fort heureusement. Sans victimiser personne, je crois que la vraie soirée qui nous fait décrocher presque complètement est celle du samedi. Lorsque nous fermons notre classe, la cloche a souvent sonné depuis longtemps et pourtant plusieurs quittent les bras chargés de tâches connexes... Un jour, nous aurons peut-être la chance d'avoir des décideurs qui posséderont les compétences essentielles pour les dossiers dont ils auront la responsabilité. L'avenir d'un peuple est lié à son éducation. Tout le monde sait ça, même les médecins!!!
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